Les ouvrages d'autrefois :
1-"La Garçonne" de Victor Margueritte.
La Garçonne est un roman publié en 1922 par Victor Margueritte : une jeune femme Monique apprenant que son fiancé la trompe décide de mener à son tour une vie libre, avec des partenaires multiples aussi bien masculins que féminines.Bien que le thème ne surprenne pas spécialement aujourd'hui, il était considéré à l'époque comme choquant, à un point tel que Victor Margueritte se vit retirer sa Légion d'honneur à la suite du scandale causé : le livre sortait dans une France se relevant à peine de la Grande guerre, et où existait un lourd déséquilibre démographique (10 % environ) entre les deux sexes, déséquilibre susceptible de créer quelques tentations tant chez des maris davantage sollicités que chez des femmes seules. Rapidement traduit en plusieurs langues (en anglais en 1923 par Alfred A. Knopf), des adaptations au théâtre et au cinéma prolongèrent son succès pendant dix ans (20 000 exemplaires vendus les quatre premiers jours de sa sortie, 750 000 exemplaires vendus en tout).
Le pamphlet féministe et radical de Victor Margueritte, symbole de la liberté des Années folles, vient d'être réédité.Le nom de Victor Margueritte est indissociable de La Garçonne, laissant à penser qu'il ne fut que l'auteur du best-seller des Années folles. Certes pas : âgé de 57 ans, Margueritte est en 1922 président honoraire de la Société des gens de lettres, décoré de la Légion d'honneur, reconnu comme auteur social depuis son livre Prostituée (1906), premier ouvrage signé sans son frère Paul qui le précéda dans la carrière littéraire. Faute d'être poète de génie comme son cousin Mallarmé ou valeureux militaire comme son père, général tué à Sedan, Victor rédige avec Paul des ouvrages sociétaux (Femmes nouvelles, 1899). La Garçonne le sort des succès d'estime, avec lesquels il renoue ensuite. Écrivain néomalthusien et pacifiste, il s'égare durant l'Occupation dans une « collaboration de plume » jusqu'à sa mort en mars 1942.
A-La thèse.
Le XIXe siècle est mort dans les tranchées, comme nombre de poilus, pendant qu'une partie de la bourgeoisie s'enrichissait de la guerre. Mais celle-ci voudrait faire croire qu'elle respecte toujours le mode de vie et les valeurs morales dont elle s'est faite le héraut. C'est d'abord l'hypocrisie de cette posture que Victor Margueritte entend dénoncer : cette haute société parisienne cache, derrière la façade des convenances, une soif de l'argent qui la porte à toutes les compromissions et un goût des plaisirs, sans limite, qui la conduit à la dépravation. Ces moeurs n'épargnent même pas les jeunes filles, devenues, à en croire l'auteur, un peu des garçonnes, effet de la guerre. Pourtant, ces fausses oies blanches sont l'objet de négociations matrimoniales à des fins financières, sans que les intéressées en aient pleinement conscience, telle l'héroïne de La Garçonne.
Fille du passé, Monique croit à la pureté des sentiments et à la fidélité dans le couple ; fille du présent, elle s'est donnée par amour avant le mariage à son fiancé. Aussi, sa déconvenue est grande lorsqu'elle découvre l'infidélité de celui-ci. Plus que le désir de vengeance, c'est la prise de conscience de l'injustice de la double morale qui domine les rapports de sexes et de son application au sein de la famille et de l'État qui révolte la jeune bourgeoise et la métamorphose en garçonne. L'émancipation féminine est, selon Margueritte, en marche.
Telle est la conviction des féministes auxquels l'auteur prête des arguments plus convaincants que ceux des adversaires de l'égalité et de la liberté féminines. Le livre se veut donc un pamphlet féministe, radical : avocate de la carrière des femmes, suffragiste, néomalthusienne, la garçonne revendique une totale liberté sexuelle, savoure la relation lesbienne - égalitaire et sans risque de grossesse -, se veut mère sans être épouse, limitant la fonction du père à celle de géniteur. Certes, l'avant-gardiste s'assagit au fil du roman, mais ce n'est, conclut le livre, que partie remise.
B-Qu'en reste-t-il ?
Faute d'avoir créé le néologisme, La Garçonne a imposé cette nouvelle identité comme l'archétype de la femme libérée de l'après-Première Guerre mondiale. Aujourd'hui encore, elle est le symbole de l'hédonisme au féminin des Années folles, de l'émancipation féminine, de l'inversion des genres et de l'épanouissement du lesbianisme. Du roman, il reste aussi le souvenir d'un énorme scandale en pornographie qui fit perdre à son auteur sa Légion d'honneur.
Le français en sortit enrichi : nom commun, « garçonne » désigne une jeune fille à l'allure masculine menant une vie émancipée ; précédé de « à la », il qualifie une coupe de cheveux courts. Démodé par les années MLF, le mot n'est plus qu'un synonyme, désuet, de garçon manqué. La Garçonne demeure, elle, le miroir d'une époque, et donc une source historique.
C-Biographie de l'auteur.
Victor Margueritte, né à Blida (Algérie) le 1er décembre 1866 et mort à Monestier (Allier) le 23 mars 1942, est un romancier et auteur dramatique français.
Fils d'un héros de la guerre de 1870, frère de Paul Margueritte et petit-cousin par sa mère de Stéphane Mallarmé, il s'engagea en 1886 dans les Spahis, avant d'entrer en 1891 à l'École militaire de Saumur où il devint lieutenant de dragons. En 1896, il donna sa démission pour se consacrer à la littérature.
Il se montra préoccupé des questions sociales et fut un ardent défenseur de l'émancipation de la femme ainsi que du rapprochement des peuples. Il collabora notamment à La Revue contemporaine d'Édouard Rod. Il soutint des opinions sociales de plus en plus avancées et collabora aux journaux et périodiques dans la mouvance internationale et communiste. La publication en 1922 de son brûlot La Garçonne, lui valut de se faire retirer sa Légion d'honneur. Rapidement traduit en plusieurs langues, le personnage Monique de son roman choqua la société de l'époque mais des adaptations au théâtre et au cinéma prolongèrent son succès pendant dix ans.
De 1896 à 1908, il collabora à toutes les œuvres de son frère Paul qui parallèlement publiait des ouvrages sous son seul nom. Il devint Président honoraire de la Société des gens de lettres.
Victor Margueritte fut un hôte assidu de Sainte-Maxime, dans le Var. Vers 1920, il acheta grâce aux droits d'auteur de La Garçonne (750 000 exemplaires vendus), une vaste propriété qui partait de la mer et montait au sommet de la colline de Meinier, magnifiquement exposée au midi et ancien oppidum ligure. Il la baptisa «Le Clos de la Madrague» en souvenir des pêches au thon qui se pratiquaient devant la propriété quelques années auparavant. Le cadre, les plantations, la vue, les meubles : tout y était admirable et réalisé avec un goût exquis. L’écrivain résida dans son belvédère avec sa seconde épouse jusqu’en 1938. Les Maximois qui le connurent le décrivaient comme un homme portant beau, toujours impeccablement habillé et qui fut fortement affecté par cette affaire de Légion d’honneur retirée.
Fervent pacifiste, Victor Margueritte collabora avec l'Allemagne pendant la Seconde Guerre mondiale au nom de la paix.
Les historiens ont retrouvé dans les archives du ministère des Affaires étrangères allemand des bordereaux de versement d'argent provenant de l'achat massif des ouvrages de Victor Margueritte.
De plus, d'importantes sommes ont été investies par les Allemands dans toutes les revues pacifistes de Victor Margueritte, afin de les rendre viables et d'assurer leur propagande.
Pour citer quelques unes de ses oeuvres on peut notamment cité : "Jeunes Filles" (1908) ; "Les Femmes et le désarmement et de l'immortalité en littérature" (1932) et "Avortement de la S.D.N." (1936).


2-"Le Deuxième sexe" de Simone de Beauvoir.

Le Deuxième Sexe est un essai existentialiste et féministe, paru en 1949, l’année des 41 ans de son auteur, Simone de Beauvoir. Cet essai, divisé en deux tomes, est considéré comme l’œuvre majeure de la philosophe. L’angle d’attaque choisi par Simone de Beauvoir est celui de l’existentialisme. Ainsi, son essai n’est pas un simple constat sur la situation des femmes après la Seconde Guerre mondiale ; c’est une œuvre à teneur philosophique, riche de références littéraires, historiques, sociologiques, biologiques et médicales. Le credo qui paraît en filigrane tout au long des pages est bien qu’aucune femme n’a de destin tout tracé. Simone de Beauvoir, excluant tout déterminisme chez l’humain, s’intéresse donc autant à l’infériorisation de la femme en tant que fait, qu’à ses causes, qui ne sauraient venir de quelque ordre naturel. L’existentialisme implique aussi l’entière responsabilité humaine : ainsi, Beauvoir incrimine presque autant les femmes, dont elle dénonce la passivité, la soumission et le manque d’ambition, que les hommes, qu’elle accuse de sexisme, de lâcheté et parfois de cruauté. Elle estime en conséquence que l’émancipation féminine réussira grâce à la volonté solidaire des hommes et des femmes. Selon elle, les deux grands faits qui permettraient à la femme de s’émanciper sont le contrôle des naissances et l’accès au monde du travail. Le Deuxième Sexe s’est vendu à plusieurs millions d’exemplaires dans le monde, traduit dans de nombreuses langues. Il reste à ce jour la référence de la philosophie féministe.
A-La femme assujettie (dominée).
Simone de Beauvoir a un constat : peu de femmes sont des génies artistiques et elle propose une explication : c’est parce qu’elles sont dominées. Pour soutenir (étayer) sa thèse elle utilise trois exemples : - Les Américains colonisés par les Anglais (18ème siècle).
- Les noirs esclaves des Etats-Unis.
- Le prolétariat Ces groupes n’ont pas été en mesure de créer parce qu’ils étaient assujettis.
Elle énonce une loi générale à partir d’exemples.
Elle répète cette idée à plusieurs reprises, l’idée de libération : (ligne 7) « la femme libre est seulement en train de naître », (ligne 4) « laisser-nous exister ».
Tout cela demandera du temps.
B- L'avenir de la femme.
Elle annonce « la fin de l’infini servage de la femme » dans un futur non précisé, son avenir de poète, et affirme que la femme « trouvera l’inconnu », idée soulignée par le la série d’adjectifs de la ligne 12. La forme de la question à la ligne 11 semble attendre une réponse affirmative.
Elle est ambiguë : elle choisit cette déclaration de Rimbaud car elle va dans son sens et parce que Rimbaud est un poète reconnu et incontesté, c’est une sorte d’argument d’autorité. Mais en même temps elle exprime des réticences et ne reprend pas complètement la citation à son compte. Elle se montre réservée sur l’idée que les mondes d’idée féminins différeront de ceux des hommes.
Il y a le modalisateur (ligne 13) « il n’est pas sûr que », la nuance (ligne 15) « dans quelle mesure », l’expression (ligne 16) « des anticipations biens tandis ».
Ces trois derniers montrent qu’elle n’adhère pas complètement à la thèse de Rimbaud sans toutefois la rejeter.
En revanche, elle termine en réaffirmant que la libération de la femme est nécessaire pour elle mais aussi pour tout le monde.
D-Biographie de l'auteur.

Simone de Beauvoir née Simone-Lucie-Ernestine-Marie Bertrand de Beauvoir le 9 janvier 1908 à Paris et morte le 14 avril 1986 (à 78 ans) dans cette même ville, est une philosophe, romancière, épistolière, mémorialiste et essayiste française.
Elle a partagé la vie du philosophe Jean-Paul Sartre. Leurs philosophies, bien que très proches, ne sauraient être confondues. Simone de Beauvoir est souvent considérée comme une théoricienne importante du féminisme, et a participé au mouvement de libération des femmes dans les années 1970.
En 1949, elle obtient la consécration en publiant Le Deuxième Sexe. Le livre se vend à plus de 22 000 exemplaires dès la première semaine, occasionne la publication des articles contradictoires de Armand Hoog (contre) et de Francine Bloch (pour) dans la revue La Nef, et fait scandale au point que le Vatican le mette à l'index. François Mauriac, l'ennemi de toujours écrira aux Temps modernes : « à présent, je sais tout sur le vagin de votre patronne ». Le livre est traduit dans plusieurs langues et aux États-Unis, se vend à un million d'exemplaires et nourrit la réflexion des principales théoriciennes du Women's Lib. Beauvoir devient la figure de proue du féminisme en décrivant une société qui maintient la femme dans une situation d'infériorité. En totale rupture avec l'essentialisme, son analyse de la condition féminine à travers les mythes, les civilisations, les religions, l'anatomie et les traditions fait scandale, et tout particulièrement le chapitre où elle parle de la maternité et de l'avortement, assimilé à un homicide à cette époque. Quant au mariage, elle le considère comme une institution bourgeoise aussi répugnante que la prostitution lorsque la femme est sous la domination de son mari et ne peut en échapper.
L'influence de Beauvoir, associée à Gisèle Halimi et Élisabeth Badinter, a été décisive pour obtenir la reconnaissance des tortures infligées aux femmes lors de la Guerre d'Algérie et le droit à l'avortement. Elle rédige le Manifeste des 343, publié en avril 1971 par Le Nouvel Observateur. Avec Gisèle Halimi, elle a cofondé le mouvement Choisir, dont le rôle a été déterminant pour la légalisation de l'Interruption volontaire de grossesse. Tout au long de sa vie, elle a étudié le monde dans lequel elle vivait, en visitant usines et institutions, à la rencontre d'ouvrières et de hauts dirigeants politiques.
Après la mort de Sartre en 1980, elle publie La Cérémonie des adieux où elle décrit les dix dernières années de son compagnon avec des détails médicaux et intimes si crus qu'ils choquent bon nombre des disciples du philosophe. Ce texte est suivi des Entretiens avec Jean-Paul Sartre qu'elle enregistra à Rome, en août et septembre 1974, et dans lesquels Sartre revient sur sa vie et précise certains points de son œuvre. Elle veut surtout montrer comment celui-ci a été manipulé par Benny Lévy pour lui faire reconnaître une certaine « inclination religieuse » dans l'existentialisme alors que l'athéisme en était l'un des piliers. Pour Beauvoir, Sartre ne jouissait plus de toutes ses facultés intellectuelles et n'était plus en mesure de lutter philosophiquement. Elle dit également à mi-mot combien l'attitude de la fille adoptive de Sartre, Arlette Elkaïm-Sartre, avait été détestable à son égard. Elle conclut avec cette phrase : « Sa mort nous sépare. Ma mort ne nous réunira pas. C'est ainsi ; il est déjà beau que nos vies aient pu si longtemps s'accorder ».
Le Prix Simone de Beauvoir pour la liberté des femmes a été créé en son honneur en 2008.
Pour citer quelques unes de ses oeuvres on peut notamment cité : "Les Mandarins" (1954) ; "L'Invitée" (1943) et "Les Belles Images" (1966).
C-Réception, influence, postérité.
Dès sa parution en 1949, Le Deuxième Sexe connut un grand retentissement : il fut immédiatement traduit dans plusieurs langues, bouleversa de nombreuses lectrices - issues de milieux intellectuellement favorisés pour la plupart - et suscita de vives réactions, majoritairement hostiles. En France, les critiques négatives vinrent surtout des catholiques et des communistes : les premiers, parmi lesquels l’écrivain François Mauriac, virent d’un très mauvais œil les analyses de la sexualité féminine ainsi que la défense des femmes ; les seconds jugèrent l’œuvre bourgeoise et condamnèrent la revendication de l’avortement et de la contraception, qui selon eux ne devaient pas passer avant les droits de la travailleuse. Le contexte en général explique cette hostilité : en 1949, la France entamait une politique nataliste ; et jamais la question de l’égalité des sexes n’avait jusqu’alors intéressé réellement les écrivains et les intellectuels. Beauvoir pensait par ailleurs qu’avec la popularisation de la psychanalyse, des chapitres tels que « L’initiation sexuelle » ou « La lesbienne », seraient compris ; elle se méprit. Enfin à travers la critique du Deuxième Sexe était attaquée Beauvoir compagne de Sartre et représentante de l’existentialisme. Hors de France, les réactions furent diverses. Beaucoup de pays catholiques rejetèrent l’essai : l’Espagne franquiste la censura (il fallut attendre une première traduction espagnole en 1962, en provenance d’Argentine) ; au Québec et en RDA, le livre fut longtemps difficile à trouver. Les pays protestants furent plus ouverts, comme la RFA, où 14 000 exemplaires furent écoulés dès 1956. Le Deuxième Sexe fut traduit surtout en allemand, en anglais et en japonais. Mais au début, ces traductions ne portaient souvent que sur des extraits ou comportaient des erreurs gênantes. Un regain d’intérêt, lié aux crises, au libéralisme, à la dégradation de la condition féminine, se dessina dans les années 1970, avec des traductions russes, perses, japonaises, etc. L’influence du Deuxième Sexe sur les mouvements féministes des années 1950 et des années 1960 fut certaine puis, malgré l’engagement de Beauvoir, s’atténua dans les années 1970 avec l’arrivée d’autres féministes. Dans les années 1980, Beauvoir et son œuvre subirent les foudres de nombreux critiques à cause de la découverte de ses correspondances et de sa vie privée. Depuis la fin des années 1990, Le Deuxième Sexe intéresse de nouveau. Contrairement aux idées reçues, c’est bien en France que les premiers travaux analysant l’œuvre ont été écrits ; mais il est vrai qu’aujourd’hui l’essai est plus étudié aux États-Unis, en Grande-Bretagne et dans les pays scandinaves qu’en France. Le Deuxième Sexe reste une référence de la philosophie féministe ; il s’est vendu en France à environ 500 000 exemplaires, acquérant ainsi un statut de best-seller.
3-"Le silence des filles. De l'aiguille à la plume" de Colette Cosnier.

Ce livre d’histoire nous dévoile les silences des femmes dans la création littéraire. Pourquoi les femmes du XIXème siècle jusqu’au milieu du 20ème siècle n’écrivent-elles pas ? A travers les journaux intimes d’une dizaine de femmes et les livres de classe et d’éducation pour jeunes filles, Colette Cosnier analyse le conditionnement et l’enfermement des femmes dans une nature « féminine » qui doit les éloigner de la recherche effrénée de la gloire, du péché capital de l’orgueil, de toute imagination et créativité, pour les maintenir dans l’obscurité de leurs rôles d’épouses, de mères, de ménagères et de soignantes au service des autres. Colette Cosnier démontre les obstacles que doivent dépasser les femmes qui veulent écrire ou créer, pour s’affranchir de cette destinée de sacrifice qui leur est assignée.Très documenté, le silence des filles se lit avec une extrême facilité. Il nous donne envie de crier et surtout de ne pas abandonner la plume, voire de la conquérir encore et encore, pour dire nos mots, et non ceux qui sont attendus des femmes.
A-Le corps censuré dans les journaux intimes des jeunes filles au XIXe siècle.
Cet exposé s'insère dans le contexte d'une analyse de quelques journaux intimes dans l'ouvrage consacré au Silence des filles. De l'aiguille à la plume. Si l'on en croit l'abbé Grimaud, "L'aiguille est à la femme ce que la plume est à l'écrivain", et jusqu'au milieu du XXe siècle, les filles ont été élevées selon un principe imposant que leurs talents de créatrices se limitent à confectionner des ouvrages de dames. Leur instruction veillait à en faire des épouses modèles et des mères attentives, et il n'était, bien entendu, jamais envisagé de les transformer en femmes savantes. Cette éducation a le plus souvent réussi à briser chez elles toute velléité d'indépendance, les obligeant à conserver la place sociétale que la nature leur avait conférée. Ecrire était un acte masculin qui leur était par conséquent refusé, et d'ailleurs, comme la affirmé Virgina Woolf, elles n'avaient pas d'espace à elles, concrètement pas plusque métaphoriquement. Certaines ont voulu y échapper, parfois avec fracas; elles sont devenues des "demoiselles sur le toit",1ou se sont réfugiées dans les monstres des ténèbres de leur imaginaire, comme ce fut le cas pour Mary Shelley, auteur de Frankenstein. D'autres ont procédé de manière beaucoup plus timide et se sont exprimées à travers leurs journaux intimes. Néanmoins, à part quelques rares exceptions, la démarche se jouait en vase clos et n'avait rien d'une bravade, l'acte posé gardait un caractère privé qui ne sortait pas des murs du foyer. Ces textes n'étaient en effet pas destinés à être publiés, et certains n'ont d'ailleurs été exhumés qu'à la suite de la découverte fortuite d'un chercheur. Ce sont les exégètes du XXe siècles qui leur ont offert une vie publique; la critique s'efforce depuis quelques années d'évaluer la fidélité du miroir déformant qu'ils offrent de la vie de ces jeunes femmes.
Les journaux intimes des jeunes filles du XIXe siècle ne reflètent qu'une image faussée du vécu réel de leurs auteurs. Il ne faut en effet pas voir dans ces documents une expression libre et spontanée. Si ces feuilles jaunies étaient apparemment les détentrices de confidences, si tous les aveux leur étaient prétendument permis, la réalité était bien autre. Ces récits autobiographiques sont en fait le fruit d'une pratique éducative plus ou moins imposée aux jeunes filles de la bonne société. Apprendre à écrire son journal intime était pratique courante, qui ne correspondait pas nécessairement à un besoin d'expression de le part des auteurs. Le but poursuivi par les éducateurs était de leur inculquer le besoin de pratiquer l'examen de conscience quotidien.
B-Les principes des filles.
"L'aiguille est à la femme ce que la plume est a l'écrivain". Jusqu'au milieu du XIXe siècle, les filles ont ete élevées dans ce principe : leurs talents de créatrice se limiteront à confectionner des ouvrages de dames. On les a instruites pour en faire des épouses modèles et des mères attentives, et non pas des femmes savantes. On leur a explique que leur cerveau est plus mou que celui des hommes. Même les sujets de rédaction et les problemes d'arithmétique de leurs livres de classe leur ont appris a rester à la place que la nature leur a donnée. Mais les adolescentes d'autrefois n'ont-elles pas eu d'autres rêves ? D'Eugénie de Guerin a Anaïs Nin, certaines ont avoué dans leur journal intime leur volonté d'indépendance, leur désir de s'instruire, ou pire, d'écrire comme les homme. Les unes ont bravé les usages, comme Marie Bashkirtseff, dont le journal annonce une autre façon de vivre. Plusieurs ont osé " se libérer ", comme Marie Leneru ou Virginia Woolf qui, a l'aube du XXe siècle, dut exorciser son sentiment de culpabilité avant de devenir romancière. Toutes ont tente de sortir du silence que leur imposait la société pour s'aventurer, avec plus ou moins d'audace, sur le chemin de l'art et de la littérature. Colette Cosnier a enseigné la littérature comparée à l'université de Rennes-II et à l'université du Maine. Elle consacre ses recherches aux femmes du XIXe siècle et a publié des romans ainsi que des biographies de Marie Bashkirtseff, Louise Bodin et Marie Pape-Carpantier.
C-Biographie de l'auteur.

Colette Cosnier. née en Sarthe, est historienne et consacre ses recherches aux femmes du XIXe siècle. Colette Cosnier a enseigné la littérature comparée à l'université de Rennes-II et à l'université du Maine. Elle consacre ses recherches aux femmes du XIXe siècle. Colette Cosnier a notamment publié "Marie Bashkirtseff", un portrait sans retouches, "Marie Pape-Carpantier" (2003) ; George Sand, en verve (2004) ; "Les quatre montagnes de George Sand" (2004) ; "Henriette d'Angeville" ; "La dame du Mont-Blanc" (2006) ; "Parcours de femmes à Rennes".
CONCLUSION :
Les hommes et les femmes ne sont pas satisfaits les uns des autres, à cause de l’oppression exercée par les premiers sur les secondes. Celles-ci veulent passer de l’immanence à la transcendance, ceux-là hésitent à accepter et provoquent de l’hostilité. Beauvoir accuse autant les hommes arrogants avec les femmes émancipées que les femmes ambiguës, qui veulent l’indépendance mais aussi de vieilles prérogatives (comme être séduites), se faisant alors sujet et objet. La guerre continuera tant que les hommes et les femmes ne s’estimeront pas semblables, tant que l’homme mystifiera la femme pour lui faire oublier son malheur, tant que la femme sera complice de sa destinée. Si la femme devenait autonome, tout le monde y gagnerait. Mais en 1949, le passé pèse encore. L’évolution doit être collective, l’éducation changer, notamment en matière de sexualité et de mixité scolaire. Il faudra aussi faire le deuil du charme féminin. Certains craignent que l’égalité hommes-femmes rende le monde ennuyeux ; il n’en sera rien, l’égalité n’annulant pas les différences, ni la passion.